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L’organisation de femme qui ambitionne de développer la commune de Cavaillon

Le 8 mars 2000, l’Organisation des femmes en action à Pliché (OFAP) a vu le jour à la quatrième section de Cavaillon. Cette institution combine agriculture et promotion des droits des femmes

Il est environ 11 heures du matin. Des femmes font un incessant va-et-vient entre une fontaine et des barils vides disposés sur une plantation. Elles sont environ une vingtaine assignée à cette tâche pour le jour. Mais en réalité, l’Organisation des femmes à Pliché (OFAP) regroupe 108 femmes de divers âges. « Nous formons 10 groupes. Du lundi au vendredi, 2 groupes de femmes accomplissent les travaux respectifs qui leur ont été confiés en réunion, explique Rosita Naissant, un membre de l’organisation. […] Si deux groupes arrosent un jour, deux autres sarcleront le lendemain.»

Pliché vit essentiellement de l’agriculture et de l’élevage. Et pendant longtemps, ce sont les hommes qui ont été au-devant de la scène, dès qu’il a été question de travailler la terre. « Les femmes se chargeaient de cuisiner et de vendre les récoltes », se rappelle Louise Naissant, ancienne Directrice de l’école presbytérale de Pliché. « Aujourd’hui, continue celle qui a fondé l’OFAP, nous pouvons manier les roues au même titre que les hommes. » Pour celle qui a initié l’organisation après 16 ans dans l’enseignement, labourer et planter offrent des opportunités économiques. « J’ai voulu que les femmes soient autonomes dans la gestion des ressources de la terre», avance Louise.

Un bâtiment entouré d’une vaste plantation de pépinières accueille les rencontres hebdomadaires programmées pour statuer sur les différents projets de l’organisation. L’espace commun de travail de l’OFAP s’étend sur plusieurs carreaux. On y trouve des centaines de caféiers, de citronniers, de cèdres, de bananiers et d’autres plantules. « Pendant plusieurs années, nous avons mis ensemble nos maigres moyens pour acquérir ce terrain au prix de 20 000 gourdes », soutient Saintalia Pierre qui a été élue coordonnatrice générale de l’organisation le 8 mars dernier. « En 2016, l’Oxfam nous a construit ce local dans le cadre d’un projet en réponse à l’ouragan Matthew ».

Un modèle de solidarité

Après la récolte, les membres de l’OFAP vendent les denrées, mettent de l’argent de côté et achètent ensuite de nouvelles plantules. Puis, elles partagent les bénéfices. «Cela nous permet de pérenniser le travail et d’avoir toujours un peu d’argent en poche », déclare Saintalia.

Des femmes font un incessant va-et-vient entre une fontaine et des barils vides disposés sur une plantation.

 Par ailleurs, les différentes activités de l’organisation constituent un appui pour les familles. Yolette Louis-Jeune, un autre membre, avance que c’est son mari qui s’occupe des plantules, des semences ou des animaux qu’elle rapporte à la maison. Clemelide Jemiel, une femme frisant la soixantaine, affirme que son mari a progressivement compris l’importance des initiatives de l’OFAP. En plus, ses enfants l’accompagnent au jardin durant les vacances.

L’organisation confie aux femmes selon leur vulnérabilité, des brebis et des chèvres qu’elles doivent remettre seulement après accouchement. « Les petits nous reviennent de droit. Ainsi, nous pouvons constituer notre propre bétail. Ce qui nous procure une certaine autonomie financière», précise la coordonnatrice.

Selon Louise Naissant, l’OFAP n’a pas de financement externe. C’est ensemble que les membres font face aux difficultés. Dans cette optique, un frais de 30 gourdes est exigé des participantes lors des réunions hebdomadaires afin d’alimenter un mutuel qu’elles ont formé. « En cas de difficulté, un membre pourra facilement prêter de l’argent à un taux de remboursement de 2% », prolonge-t-elle.

 Un pari contre la violence basée sur le genre

Les violences conjugales et le viol étaient fréquents dans la zone avant l’existence de l’OFAP, confient les membres de l’organisation. Elles ont dû inscrire cette thématique dans la liste de leurs priorités.

 A la requête de l’OFAP, des formations basées sur l’équité de genre ont été réalisées conjointement avec des organisations non-gouvernementales pendant plusieurs années. «Nous savons aujourd’hui que personne n’a le droit de lever la main sur nous. Si cela arrive, nous pouvons poursuivre l’agresseur en justice. Et nous savons aussi que la loi nous donne droit à un avocat même quand nous n’avons pas d’argent », admet Yolette Louis-Jeune. Grâce à ces formations, ajoute-t-elle, les cas de violences faites aux femmes ont été réduits à Pliché.

Pour le retour du café à Cavaillon

A cause du déboisement, le café qui représentait la principale production agricole à Cavaillon a disparu depuis quelques années  expliquent des membres de l’OFAP. L’ouragan Matthew a aussi ravagé, en 2016,  plusieurs plantations de cafés dans la commune. L’organisation ambitionne, en compagnie d’autres institutions, de relancer la culture caféière à Cavaillon. « C’est le nouveau défi que nous voulons relever », lance fièrement Louise Naissant.

L’organisation ambitionne, en compagnie d’autres institutions, de relancer la culture caféière à Cavaillon. « C’est le nouveau défi que nous voulons relever », lance fièrement Louise Naissant.

Parallèlement, la région du Sud est frappée par une sévère sécheresse qui inquiète les paysans. L’OFAP pense avoir trouvé une alternative à la situation. « Nous avons opté pour le modèle de jardin agro forestier. C’est une méthode qui permet de produire en un même jardin, des fruits, des cultures vivrières et des arbres forestiers. Elle protège le sol et permet d’avoir des récoltes pendant toute l’année», continue, cette fois, Rosita Naissant.

L’organisation ambitionne, en compagnie d’autres institutions, de relancer la culture caféière à Cavaillon.

L’organisation place la relance du café parmi les réalisations qui devront marquer son vingtième anniversaire. Pour y parvenir, les femmes ne ménagent plus leurs efforts. « Nous  transportons l’eau sur nos têtes pour arroser nos différentes espèces de caféiers régulièrement. Nous œuvrons pour canaliser cette eau jusque vers les plantes afin de ne plus avoir à la transporter», ajoute Rosita.    

Malgré les difficultés liées au financement, l’influence de l’organisation s’en va grandissant. Les retombées attirent aussi de nouveaux membres. «Sans, le support de l’OFAP, je n’aurais pas pu posséder du bétail. Aujourd’hui je peux vendre et acheter des plantules pour ma famille sans attendre le soutien de l’Etat», conclut Clemelide Jemiel, qui est la plus âgée de l’organisation.

 

Ce texte est écrit par la journaliste Laura Louis  qui a remporté le premier prix de la catégorie presse écrite du concours « Prix Jeune Journaliste en Haiti » organisée par l’Organisation Internationale de la francophonie (OIF).   

Laura Louis est journaliste a Ayibopost et étudiante finissante a l’Université d’Etat d’Haiti.

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